Pescarolo & co.

Lors de notre dernière émission, nous revenions sur l’heureux dénouement pour Henri Pescarolo et son équipe, miraculeusement sauvée le 15 octobre dernier, sous les yeux mêmes de son fondateur venu assister au démantèlement de sa formidable écurie après des mois de combat.

C’est en 2002 que le quadruple vainqueur du Mans (1972, 1973, 1974 et 1984) et recordman de participation à la prestigieuse épreuve des 24 heures (33 départs) donne naissance à Pescarolo Sport. Si dans un premier temps l’écurie engage des châssis Courage, en 2007, Pescarolo décide de faire ses propres châssis. L’écurie française devient alors manufacturier et « Pesca » doit trouver de nouveaux partenaires afin de financer le projet dans lequel il se lance. Jacques Nicolet, propriétaire de l’écurie OAK Racing sera le premier à répondre à l’appel et s’associe à Pescarolo dont il exploitera également les châssis. Cependant, cela ne suffit pas et Pescarolo accumule les dettes, précipitant son rachat à hauteur de 100% par Jean Py, propriétaire de la société « SORA Composites » spécialisée dans les matériaux composites de compétition, le tout pour un euro symbolique en échange de la promesse de redresser les comptes de l’écurie et préserver les emplois. Pescarolo, gardien du temple, reste à la tête de l’écurie, mais rapidement le français comprend qu’il a fait entrer le loup dans la bergerie.

En effet, après coup, Pescarolo accuse. Selon lui, les intentions de Jean Py n’étaient pas dénuées d’arrières pensées puisqu’il s’agirait, ni plus ni moins, pour l’industriel, que de se servir de Pescarolo Sport et de son bureau d’étude pour répondre à l’appel d’offre qu’a lancé l’Automobile Club de l’Ouest (qui organise les 24 heures du Mans) pour la fabrication d’un prototype école. Pour l’ACO l’objectif est simple : il s’agit de remplacer les monoplaces utilisées par l’école de pilotage du Mans par des prototypes, créant ainsi une filière digne de ce nom pour l’Endurance.

L’écurie est dès lors scindée en deux. D’un côté, Pescarolo Sport qui est censée faire rouler des voitures pour la compétition, et de l’autre, SORA Racing qui se présente comme une sorte d’écurie laboratoire des prototypes de demain.

Pourtant la situation économique ne s’arrange toujours pas. Jean Py ne tient pas ses engagements financiers, et début 2010, tout le monde de l’endurance est relativement pessimiste sur l’avenir de l’écurie, dont on dit même qu’elle pourrait être sauvée par Genii Capital, qui vient alors de faire un énorme coup en rachetant une partie de l’écurie Renault de Formule Un…

Malgré tout, en vertu de leurs résultats 2009, les Pescarolo sont pré-qualifiées pour les 24 heures du Mans 2010. Pourtant, on ne les reverra plus en piste, si ce n’est sous les couleurs de l’écurie OAK Racing qui aligne des châssis français en LMP2. En effet, quelques jours avant le départ des 24 heures, Pescarolo déclare purement et simplement forfait pour la reine des épreuves d’endurance avant d’être placée en liquidation judiciaire quelques jours après l’abaissement du drapeau à damiers, Jean Py ayant échoué dans sa recherche de nouveaux partenaires.

Henri Pescarolo n’est alors plus qu’un spectateur de la mauvaise gestion de « son » équipe, depuis que Jean Py lui a retiré sa confiance. On apprendra par la suite que la propriété intellectuelle, les moules et l’autorisation de fabrication ont été vendus à Jacques Nicolet, ce qui semble confirmer l’accusation portée par Henri Pescarolo sur les intentions initiales de Jean Py.

Le 15 octobre dernier, donc, les actifs de Pescarolo Sport étaient mis aux enchères. Pescarolo, qui déclarera que c’était comme « assister à son propre enterrement », en repartira malgré tout avec le sourire. En effet, alors que les biens doivent être vendus par lots, deux acheteurs se présentent pour faire l’acquisition du tout, en un seul lot, pour un montant de 400.000 €. Adjugé ! Vendu ! Parmi ces acheteurs, deux amis d’Henri Pescarolo, on retrouve Jacques Nicolet. Pescarolo a de quoi espérer et le 18 octobre Pescarolo Team voit le jour ! Depuis les statuts de l’Association Pescarolo 2011 ont été déposés afin de permettre à toutes les bonnes volontés d’œuvrer au retour des célèbres voitures vertes au Mans, dès 2011.

Inévitablement, le destin de Pescarolo Sport n’est pas sans nous rappeler le destin d’une autre écurie française acculée jusqu’aux enchères : Prost Grand Prix. Le SAV de la F1 saisit donc la balle au bond pour revenir sur le destin, souvent funeste, de ces écuries de champions de la F1.

En effet, Jack Brabham, John Surtees, Graham Hil, Emmerson Fittipaldi, Jackie Stewart et Alain Prost partagent pour point commun d’avoir lancé leur propre écurie de Formule Un après avoir conquis le titre, Stewart et Prost ayant été les seuls à ne pas avoir piloté sous leurs propres couleurs. On leur adjoint souvent Jacques Villeneuve qui est cependant un cas à part puisque l’écurie BAR a été fondée par Craig Pollock, avec l’aide de British American Tobacco, autour du pilote canadien.

Cependant, la plupart du temps, bien que fondées par des champions du monde, ces écuries n’en connaissant pas moins les mêmes affres que toute écurie, avec sans doute, parfois, un héritage lourd à porter et des attentes souvent vite déçues.

Stewart, en est la seule exception… Associé à son fils, Paul, il a passé le témoin à Ford après avoir vu ses voitures briller en 1999. Nous ne reviendrons donc pas sur le cas de l’écurie écossaise mais sur les autres écuries, y compris Brabham qui fut la seule à avoir véritablement connu la gloire avant de connaître une fin aussi brutale que piteuse.

[tab:John Surtees]

Surtees Racing Organisation

Qu’on se le dise, John Surtees est un touche-à-tout… Auteur, trois années de suite, d’un formidable doublé 350cc/550cc en moto, il ne tarde par à faire montre de son agilité sur 4 roues en remportant le titre suprême de la Formule Un en 1964. En 1966, le britannique vit sa première expérience de pilote/propriétaire lors de la première saison du championnat CanAm qu’il remporte haut la main, avant de renouveler l’expérience, en 1969, cette fois-ci en Formule 5000. C’est donc, assez logiquement, après une saison 1969 décevante chez BRM (alors que son écurie tourne bien en F5000) qu’il décide de fonder sa propre écurie de Formule Un, en 1970.

Alignant dans un premier temps des McLaren avant d’utiliser ses propres châssis, l’écurie Surtees connaît des débuts honorables. Se retirant définitivement de la compétition en 1972, Surtees se consacre à son écurie qui signe, en Italie, son premier podium, la même saison, avec la 2ème place de Mike Hailwood. La saison suivante sera plus délicate et la 3ème place de José Carlos Pace au Grand Prix d’Autriche ne sera que l’arbre cachant une forêt d’abandons.

L’écurie connaît alors ses premières difficultés budgétaires. Alors qu’elle pouvait aligner jusqu’à 3 voitures à ses débuts, en 1975, elle n’alignera plus qu’une voiture pour l’ensemble de la saison et ne participe même pas aux deux derniers Grand Prix.

En 1976, l’écurie britannique se donne un peu d’air frais en signant un sponsor plutôt controversé à l’époque : Durex. Elle peut ainsi aligner deux voitures, dont celle d’Alan Jones qui fait une saison honorable en rentrant 3 fois dans les points.

En 1977, Surtees ayant poussé l’australien vers la sortie, engage Vittorio Brambilla qui fait une saison tout aussi honorable que celle de Jones l’an passé, tandis que le second baquet est souvent utilisé par des pilotes payants qui échouent souvent en qualifications et ne transforment pas les opportunités qui leurs sont données de prendre le départ. Le manque de résultats conduisant inexorablement au manque de sponsors, l’écurie mis la clé sous la porte fin 1978, après une saison noire où Brambilla ne rentra qu’une seule fois dans les points.

[tab:Graham Hill]

Embassy Racing with Graham Hill

Ne supportant plus l’atmosphère régnant chez Brabham, alors en pleine crise de succession, Graham Hill, double champion du monde, décide de prendre une bouffée d’air frais en fondant sa propre écurie avec le soutien du cigaretier « Embassy ».

Dans un premier temps, l’écurie « Embassy Racing with Graham Hill » aligne un châssis Shadow avec, à son volant, Graham Hill en personne. Naturellement, la saison est décevante pour un champion de l’envergure de Hill, mais l’écurie n’en est alors qu’à ses débuts. En 1974, sans guère plus de succès que la saison précédente, Hill utilise des châssis Lola et s’offre le luxe d’une deuxième voiture.

En 1975, après avoir connu l’affront de la non-qualification, « chez lui », à Monaco, Graham Hill décide de raccrocher le casque et de se consacrer pleinement à la gestion de son écurie. Pour la première fois, Hill aligne ses propres châssis et s’arroge les services d’un jeune pilote britannique, Tony Brise, dont les performances promettent de belles choses pour la saison 1976.

Malheureusement, c’est justement au retour d’une séance d’essais qui avait lieu en France pour préparer la saison 1976, que l’écurie Hill allait connaître une fin tragique. En effet, le 29 novembre, alors qu’il règne un épais brouillard au dessus d’Arkley, l’avion de Graham Hill se crashe avec à son bord, le double champion du monde, ainsi que Tony Brise, l’ingénieur Andy Smallman, et trois autres membres de l’écurie.

Ainsi décapitée, l’écurie ne s’en releva pas et cessa immédiatement toute activité, alors que la saison 1976 s’annonçait des plus prometteuses.

[tab: Emerson Fittipaldi]

Copersucar – Fittipaldi

Fin 1973, les frères Fittipaldi, Wilson et Emerson, décident de monter un projet de Formule Un 100% brésilienne. En 1974, Wilson se retire de la compétition pour monter le projet, tandis qu’Emerson distille ses conseils alors qu’il est toujours en contrat chez McLaren. L’écurie fait ses débuts en 1975 sous les couleurs de Copersucar, une importante compagnie de l’industrie sucrière, avant de devenir Fittipaldi Automotive en 1978. Tout comme Surtees, les frères Fittipaldi n’en étaient pas à leur coup d’essais puisqu’ils dirigeaient une petite affaire de karting dans les années soixante avant de se lancer dans la construction de châssis de Formule Vee.

Wilson est le seul pilote de l’écurie en 1975 : il ne termine que 5 courses et échoue à 3 reprises dans l’exercice de la qualification. Pendant ce temps, Emerson conquiert son deuxième titre de champion du monde et surprend le monde de la F1 en annonçant son départ pour l’écurie Copersucar. Le brésilien est alors modeste, mais ambitieux : « Je sais que je n’ai, théoriquement, aucune chance de remporter le titre la saison prochaine… […] Je pense que d’ici une à deux saisons le Brésil aura une des meilleures équipes au monde. »

Et effectivement, la première saison de Fittipaldi est difficile, mais moins que ne l’avait été 1975. Un bond en avant a lieu en 1977 pour l’écurie qui a le mérite d’aligner depuis le début ses propres châssis, dessinés par l’ingénieur brésilien Divila. La saison commence en effet tambour battant avec deux 4ème place en Argentine et au Brésil, l’écurie inscrivant au total 11 points avec toujours comme unique pilote, Emerson Fittipaldi, aidé, lors des deux premiers Grand Prix par Ingo Hoffman. La saison suivante est encore meilleure avec une brillante deuxième place au Brésil acquise par Emerson qui continue à porter à lui seul tous les espoirs de l’écurie et engrange 17 points sur l’ensemble de la saison.

Mais 1979 marque un coup d’arrêt brutal, et presque fatal, pour l’écurie brésilienne. Effectivement, la maîtrise de l’effet de sol est devenue une des principales clés du succès, et de ce point de vue, la F6 est un raté. N’ayant inscrit qu’un point pendant la saison, l’écurie enregistre son pire bilan depuis l’arrivée d’Emerson. Du coup, déçu par ces résultats, Copersucar lâche les frères Fittipaldi qui vont malgré tout retomber sur leurs pattes en s’associant avec Wolf, dès 1980, engrangeant deux podiums : un pour Emerson aux Etats-Unis et l’autre pour Rosberg en Argentine. Mais ce sont là les derniers soubresauts d’une écurie qui ne fait plus que survivre. Fittipaldi arrive à peine à boucler son budget et en 1981 elle accuse un bilan de 9 abandons et 13 non-qualifications, pour ses deux pilotes, Chico Serra et Keke Rosberg, Emerson ayant tiré sa révérence pour se concentrer sur la gestion de l’équipe.

En 1982, les frères Fittipaldi ne peuvent aligner qu’une seule voiture, celle de Chico Serra et début 1983, faute de budget, l’écurie ferme ses portes. Entre temps, bien malgré elle, elle est entrée dans l’Histoire, puisque Keke Rosberg reste à ce jour le seul champion de Formule Un à avoir été sacré sans avoir marqué le moindre point la saison précédente… chez Fittipaldi.

[tab:Jack Brabham]

Brabham Racing Organisation

Après avoir aligné ses propres Cooper lors de courses hors-championnat en 1961, Jack Brabham aidé de l’ingénieur australien Ron Tauranac, créé l’écurie qui portera son nom et avec laquelle il conquerra son troisième et dernier titre en 1966, avant de voir Denny Hulme lui succéder en 1967.

En 1969, après avoir souffert d’une blessure au pied après un crash, « Black Jack » promet à sa femme de raccrocher son casque en fin de saison. Il vend alors ses parts dans l’écurie à Ron Tauranac qui en devient le seul et unique propriétaire. Pourtant, le pilote australien sera contraint de reporter sa promesse d’une saison. En effet, l’écurie australienne comptait sur le retour de Jochen Rindt qui avait porté ses couleurs en 1968. Parti chez Lotus pour la saison 1969, le pilote autrichien n’est absolument pas sur la même longueur d’onde que Colin Chapman dont il critique la dangerosité des voitures. Rindt avait donc l’intention de retrouver l’écurie Brabham pour la saison 1970, mais c’était compter sans l’offre de dernière minute que lui fit Colin Chapman et que l’autrichien accepta… pour le meilleur et pour le pire.

Suite à ce retournement de situation, Jack Brabham décide de rempiler pour un an, donnant le temps à l’écurie de trouver un autre pilote de pointe pour la saison 1971. En 1970, les décès successifs de McLaren, Courage et Rindt ont raison de Jack Brabham qui tient enfin sa promesse en raccrochant le casque.

S’ouvre alors une crise de succession dans l’écurie dirigée par Ron Tauranac. Pour ce dernier, le pari financier est bien trop lourd à porter pour lui seul et, fin 1971, il revend, pour 100.000£, l’écurie à Bernie Ecclestone. L’ingénieur australien renoue avec ses premières amours en dirigeant l’atelier de conception de l’écurie mais le mariage est de courte durée et, sans surprise, c’est Bernie Ecclestone qui est à l’origine du divorce. En effet, le businessman anglais revoit l’organisation de l’écurie, ce qui n’est pas du goût de Tauranac qui n’a pas été consulté et décide donc de prendre ses cliques et ses claques.

Pendant 15 ans, Bernie Ecclestone maintiendra l’écurie Brabham au premier plan, enrichissant même son palmarès de deux nouveaux titres pilotes, en 1981 et 1983, glanés par Nelson Piquet, avec, parfois, un parfum de scandale.

Pour plusieurs raisons, la saison 1986 portera les germes de la fin d’une des plus prestigieuses écuries de Formule Un. En effet, et pour commencer, l’écurie enregistre le départ de Nelson Piquet, déçu des résultats en 1985 et qui file à l’anglaise chez Williams-Honda : choix judicieux puisqu’il se battra dans la course au titre.

En 1986, l’écurie aligne donc le revenant Ricardo Patrese, ancien pensionnaire du temps de Parmalat, et engage le talentueux Elio de Angelis pour remplacer le double champion du monde brésilien. Malheureusement, pour l’italien, l’aventure Brabham est de courte durée puisqu’il se tue lors d’essais privés organisés au Castellet, dans les Esses rapides de Verrières. Si bien évidemment, le « show continue », le moral de l’équipe est forcément au plus bas après le drame, et rares sont les celles qui relèvent facilement.

Un peu plus tard dans la saison, après avoir un temps songé à monter sa propre écurie, BMW décide de cesser toute activité en Formule Un. Bernie Ecclestone s’accroche au contrat qui le lie au constructeur bavarois et obtient qu’il continue de fournir ses moteurs pour la saison 1987, mais il s’agira de moteurs vieillissants, ce qui constitue un obstacle à l’ère des moteurs turbos et des contraintes qui leur sont peu à peu imposées en terme de consommation par l’autorité sportive. En 1987, les pilotes ne voient le drapeau à damiers qu’à 7 reprises, sur 32 possibles, la saison étant marquée par de nombreux abandons et sauvée par deux 3ème place en Belgique et au Mexique.

Mais l’événement le plus important fut sans doute le départ de Gordon Murray, fin 1986, pour l’écurie McLaren. L’ingénieur/concepteur des Brabham depuis près de 15 ans décide de quitter l’écurie après avoir constaté un relâchement de l’intérêt de son propriétaire, Bernie Ecclestone. En effet, ce dernier, très intéressé par la gestion des droits commerciaux de la F1 est d’avantage accaparé par les affaires politiques de la F1 et délaisse la gestion de son équipe, qui repose sur Gordon Murray. Les résultats de 1987 trouvent là un nouvel éclairage et expliquent la décision de Bernie Ecclestone de mettre la clé sous la fin à la fin de la saison.

Absente des circuits en 1988, l’écurie n’en est pas morte pour autant et connaîtra une fin piteuse entre les mains de propriétaires plus ou moins qualifiés pour honorer l’héritage « Brabham ». En 1989, l’écurie refait son apparition, rachetée entre temps par le suisse Joachim Luthi. Cependant, au milieu de la saison, ce dernier est arrêté pour fraude fiscale et l’écurie change à nouveau de propriétaire.

Cette fois-ci, c’est le groupe japonais « Middlebridge Group Limited » qui investissent dans l’écurie Brabham sans pour autant lui donner plus de moyens que ça. L’écurie va survire 2 saisons sans faire de résultats probants et en 1992, après 3 Grands Prix elle met définitivement la clé sous la porte faute de moyens.

[tab:Alain Prost]

Prost Grand Prix

Pour le quadruple champion du monde, c’est une vieille envie que celle de vouloir monter sa propre équipe. Il en a même l’occasion fin 1991, après sa triste fin de parcours chez Ferrari, puisqu’on parle du rachat de Ligier, mais les implications politiques sont trop grandes pour lui.

En 1994, après son titre chez Williams Renault, il accepte un poste auprès de Renault. Convaincu que l’avenir de la F1 passe par les constructeurs, il propose même à Patrick Faure, patron de la compétition dans la firme au Losange, un projet d’écurie Renault F1 avec Adrian Newey à la conception, Jean Todt à la direction sportive et Canal + comme partenaire. Pourtant, le constructeur français n’y croit pas et prépare même son départ de la scène de la Formule Un.

C’est pourtant bel et bien avec Ligier qu’il va se lancer, en 1996, et pour le coup, l’affaire est purement politique, puisqu’on demande, dans les hautes sphères de l’état, ni plus ni moins, à Prost, que de sauver la F1 française.

Prudent, Prost exige des garanties, à savoir le soutien d’un constructeur français dès 1998, prolongeant le partenariat de Ligier avec Mugen-Honda pour sa première saison. Renault se retirant en 1997, il ne reste plus que Peugeot qui y va sans grand enthousiasme, ce qui reste malgré tout suffisant pour convaincre Prost de se lancer plutôt que d’accepter les offres qui émanent de chez McLaren.

Cependant, rapidement, Prost est confronté à la mauvaise volonté du constructeur au lion et reconnaîtra plus tard que rapidement il a su que son projet était condamné. En effet, contrairement à ce qui avait été convenu, Peugeot a revu à la baisse son engagement avec l’écurie qui passe de 5 à 3 ans mais a également revu à la hausse ses tarifs en ne garantissant plus la gratuité de ses services. Prost est prit au piège et paradoxalement, sa première saison avec le moteur Mugen-Honda sera la meilleure.

La dissolution de l’Assemblée nationale en 1997 n’arrange pas les affaires de Prost. Avec l’échec de Jacques Chirac et l’arrivée au pouvoir du Parti Socialiste, sauver la F1 « bleue-blanc-rouge » n’est plus à l’ordre du jour de l’agenda gouvernemental. Courant 1997, Prost se retrouve donc à la tête d’un projet qui n’a plus grand-chose à avoir avec ce qu’il était initialement.

Et les choses ne s’arrangeront pas avec le comportement de Peugeot qui jouit, contractuellement, d’un droit de regard sur l’activité de l’écurie et rend la tâche du pilote français des plus difficiles. Paradoxalement, Peugeot, envahissant dans la gestion de Prost, se disperse en préparant son retour aux affaires en Rallye. Pour Prost, la dragée est dure à avaler, ce qui lui vaudra cette remarque cinglante auprès des dirigeants de Peugeot : « Très bien, vous allez gagnez facilement puisqu’il n’y a aucune concurrence en face. […] La F1 nécessite un véritable investissement, et ne pas l’accepter c’est courir à l’échec. »

Manquant de soutien politique, d’un véritable investissement de Peugeot, et auteur de performances d’abord enthousiasmantes puis franchement décevantes, l’écurie peine à trouver un financement. Canal + et Alcatel se retirent et cèdent la place à Yahoo ! qui ne tardera pas à souffrir des effets de l’éclatement de la bulle numérique.

Les mauvais résultats de la saison 2000, où l’écurie se classe 11ème du championnat, privent Prost Grand Prix des revenus des droits télé qui sont répartis entre Bernie Ecclestone et les 10 premiers du classement constructeur. De plus, en 2001, au terme de son contrat de fourniture avec Peugeot, Prost doit assumer les 30 millions de dollars requit par Ferrari pour lui fournir ses moteurs, rebadgés Acer, alors que dans le même temps il perd le soutien de Gauloises et Yahoo !

Prost est ainsi contraint de céder 40% de ses parts à Pedro Diniz et de se séparer du prometteur Nick Heidfeld pour s’assurer les services de Gaston Mazzacane – et de ses précieux sponsors -, remplacé à son tour, en cours de saison, par Luciano Burti.

Exsangue financièrement, l’écurie pâtit également de l’ombre que projette Renault qui a remis les pieds en F1 après le rachat de l’écurie Benetton en 2000. Prost est alors victime de ses propres projections : la F1 appartient bien désormais aux constructeurs et les sponsors l’ont parfaitement compris en préférant parier sur Viry-Châtillon plutôt que sur Guyancourt.

Le 22 novembre 2001, avec plus de 30 millions d’euros de dettes, Prost Grand Prix est placée en redressement judiciaire avant d’être mise en liquidation le 15 janvier 2002. Tom Walkinshaw, patron de l’écurie Arrows, est le seul éventuel repreneur des actifs de l’écurie, mais la FIA oppose une fin de non recevoir à l’utilisation des châssis et des plans de l’écurie française.

Fin de l’histoire pour Prost qui ne connaîtra pas la chance qui fut celle de Pescarolo le 15 octobre dernier : Pescarolo pouvait compter sur ses amis, Prost, lui, avait la conviction que l’on cherchait à l’abattre.[tab:END]

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