GP Canada 1973 : Safety Car, une première chaotique

Le Grand Prix du Canada 1973 restera dans l’histoire de la Formule 1 comme la première apparition d’une voiture de sécurité en course. Mais aussi comme l’un des imbroglios les plus ubuesques de la discipline. C’était il y a 42 ans.

[tab:Le contexte]

1973, année dramatique

Au moment de l’arrivée à Mosport, théâtre de l’avant-dernière manche du calendrier, la saison 1973 est une saison tragique. Déjà.

Afrique du Sud

En Afrique du Sud, un accrochage à quatre envoie les voitures de Mike Hailwood (Surtees) et de Clay Regazzoni (BRM) hors piste et en flammes. Le premier s’extrait très rapidement de sa monoplace et voit que le Suisse gît inconscient dans son baquet. Il détache alors son harnais mais ne parvient pas à le sortir seul, d’autant plus que le feu commence à lui brûler les mains et les jambes, l’obligeant à trouver un endroit où pouvoir se mettre lui-même en sécurité avant de revenir à la charge, avec l’aide de commissaires, pour extirper Regazzoni du cockpit. Ce dernier s’en tirera avec de simples brûlures. Mais personne n’arrête la course. Pour sa bravoure, un prix spécial et unique sera créé et remis à Mike Hailwood – le Prix Rouge et Blanc Joseph Siffert – et il se verra remettre la George Medal, plus haute distinction civile de Grande-Bretagne.

Pays-Bas

Quelques mois plus tard, à Zandvoort, rebelote. Mais cette fois, l’issue est horrible. Roger Williamson s’accidente au volant de sa March, sans doute en raison d’un problème pneumatique. Sa voiture vient violemment percuter le rail à la sortie du Tunnel Oost et est renvoyée de l’autre côté de la piste, près de 300 mètres plus loin. Les images montrent la voiture retournée, déjà partiellement en flammes, glissant sur l’arceau de sécurité avant de s’immobiliser sur le bas-côté. Piégé dans sa monoplace, le pilote ne peut en sortir seul mais il est bien en vie et conscient.

C’est alors que son compatriote, équipier mais surtout ami, David Purley, stoppe sa voiture et se précipite vers l’épave de la March. Il tente par tous les moyens de la retourner, sans succès. Il se saisit d’un extincteur pris dans les mains de commissaires apathiques mais surtout apeurés et non équipés pour faire face aux flammes. Il tente d’éteindre le feu, sans succès. Le temps passe, rien ne se passe, la course n’est pas arrêtée, aucun pilote n’imagine qu’il y a encore quelqu’un dans les restes de cette monoplace. Purley doit se résoudre à accepter l’inacceptable, titubant un moment sur la piste, effondré. Le héros impuissant recevra lui aussi la George Medal. Au bout de huit longues minutes, un camion de pompiers parviendra enfin près de la March calcinée : « C’est bien trop tard s’il faut aussi longtemps pour que la brigade de pompiers arrive avec des combinaisons ignifugées, » constatera le commentateur néerlandais. La course n’ayant pas été arrêtée, le déplacement du camion a été ralenti, interdisant toute action rapide.

Attention, les images qui suivent peuvent heurter la sensibilité.

Lors de ce Grand Prix des Pays-Bas, Denny Hulme, furieux de voir ce qui se passait autour de la voiture de Williamson, agita frénétiquement ses poings au niveau des officiels à chaque passage, pour leur demander d’agir. D’autres pilotes estimèrent que la course n’aurait pas dû continuer.

Prise de conscience

Ces incidents créent une vive émotion dans le monde de la F1 et il devient quasiment inconcevable d’imaginer qu’une course puisse se poursuivre dans des conditions presque normales alors que des pilotes sont encore dans leurs voitures accidentées, que des commissaires travaillent et que des véhicules d’intervention se rendent sur les lieux des crashes.

Ainsi, il est décidé par la Commission Sportive Internationale de la FIA, sur le modèle des courses américaines sur ovale, d’introduire un pace car – une voiture de sport de la direction de course qui se placerait devant l’ensemble des concurrents pour neutraliser l’épreuve et permettre l’intervention des secours en cas de gros incident. La nouveauté est un peu testée pendant les essais du Grand Prix d’Autriche mais pas pendant le Grand Prix d’Italie qui suit.

[tab:Le Grand Prix]

Le Grand Prix

Affiche du GP du Canada 1973

En Italie, Jackie Stewart est sacré champion et remporte sa troisième couronne mondiale grâce à sa 4ème place. Du côté de Lotus, Emerson Fittipaldi est chafouin : il aurait voulu que Ronnie Peterson, alors en tête, s’écarte pour le laisser passer afin qu’il reste dans la course au titre. Cependant, le Suédois explique qu’il n’avait aucune raison de faire cela car la position de Stewart lui assurait quoiqu’il arrive la première place au championnat. Colin Chapman, le directeur de l’écurie, soutient Peterson dans cette démarche. En repartant du Canada, le Brésilien aura d’autres raisons d’être chafouin.

La lutte pour le titre constructeurs entre Tyrrell et Lotus est donc la principale attraction du Grand Prix du Canada 1973, couru à Mosport Park, circuit rapide et vallonné situé dans la Province de l’Ontario, au sud-est du pays. Mais pas que : c’est le retour de Jody Scheckter. Après avoir provoqué un accrochage avec Fittipaldi alors que le duo menait le Grand Prix de France et après avoir initié l’un des plus gros carambolages de l’histoire lors du Grand Prix de Grande-Bretagne, le jeune Sud-Africain va de nouveau courir pour McLaren.

Circuit de Mosport Park

Le samedi

La tournée nord-américaine doit être une fête, avant tout, après une saison longue et difficile. Cependant, en ce samedi matin, l’on passe près du drame. Comme un avertissement avant Watkins Glen, Ronnie Peterson est victime d’un accident qui l’envoie dans les barrières Armco. Par chance, il en réchappe : sa voiture, en sortant en haut du banking, s’est « posée » sur les rails, complètement détruits à l’endroit de l’impact. Plus tard, c’est Niki Lauda qui sera victime d’un gros carton après avoir décollé puis être retombé violemment sur la piste. Il ne souffrira que d’un poignet foulé.

Au soir de cette seconde journée, les qualifications accouchent sans surprise d’une nouvelle pole position de Peterson. Le Suédois rayonne dans cet exercice depuis le début de la saison : 8 poles sur 14 Grands Prix auxquelles il ajoutera un dernier départ au premier rang à Watkins Glen. À ses côtés sur la première ligne, l’Américain Peter Revson (McLaren) puis, en deuxième ligne, Scheckter et Carlos Reutemann (Brabham), eux-mêmes devant Fittipaldi et Cevert.

Le dimanche

La pluie s’abat sur le circuit de Mosport. Mieux encore, il y a un brouillard à couper au couteau. Même en 1973, on ne prend pas le risque d’un départ dans ces conditions. La course est retardée d’une heure. Quand le départ est finalement donné, la piste est détrempée mais praticable et toutes les voitures ont été réglées pour cette piste humide. Peterson prend un bon départ, s’échappe, mais commet une erreur dans le 3ème tour. Il cède alors le commandement à Lauda, auteur d’un excellent départ depuis le 8ème emplacement. L’Autrichien fait le spectacle dans ces conditions et se construit une avance de près de 25 secondes sur le duo Lotus en une quinzaine de tours, avant que Peterson ne soit victime d’une sortie de piste.

Le tarmac est déjà bien séchant et les choses se gâtent. Lauda perd soudainement 4 secondes. Fittipaldi revient à 8 secondes quand l’Autrichien décide de s’arrêter pour monter les pneus intermédiaires. À l’avant, Jackie Oliver revient à 5 secondes de la Lotus. Mais tout va changer rapidement. Une foire d’arrêts se prépare aux stands. En plus de changer les gommes – ce qui n’était déjà pas une sinécure à une époque où les équipes n’étaient pas spécialement équipées pour – de nombreux pilotes demandaient des changements de réglages afin de mieux appréhender le tracé. Sur une courte période, ce sont pas moins de 54 arrêts qui sont comptabilisés.

Devant ce balai incessant et étourdissant, tout le monde perd pied : les spectateurs, les médias mais surtout les écuries et la direction de course sont perdus dans leurs décomptes, qui étaient manuels à l’époque. Colin Chapman, Ken Tyrrell et Bernie Ecclestone font l’aller-retour dans les puits pour essayer de comprendre le classement.

Et comme si cela ne suffisait pas, alors que les deux hommes ressortent des stands ensemble, Scheckter se fait encore remarquer et accroche Cevert dans le 33ème tour. L’accident est assez violent, le Français se blessera légèrement aux chevilles. Les deux hommes sont saufs mais en viennent presque aux mains quand les commissaires les séparent. La piste est grandement obstruée par des véhicules d’intervention. C’est donc le moment idéal pour lancer, avec quasiment zéro essai, la voiture de sécurité. Trois tours après.

Une Porsche 914 jaune se tient en effet en bout de ligne des stands, avec à son bord Eppie Wietzes, le pilote, et Peter MacIntosh, le représentant de la FOCA. Logiquement, avant d’entrer en piste, les deux hommes attendent le signal de la direction de course. Le signal est donné : il faut ressortir devant la voiture n°25, l’ISO-Marlboro de Howden Ganley. Le doute se fait soudain très envahissant : comment ce pilote néo-zélandais pourrait-il mener cette course ? Lui-même est incrédule, il fait plusieurs fois signe pour demander s’il est bien devant. À trois reprises, MacIntosh demande confirmation à la direction de course et à trois reprises il obtient la même réponse : « Restez devant le numéro 25. » Le peloton finit par complètement se reformer derrière lui, mais certains pilotes ravitaillent de nouveau.

Sur ces images résumant le week-end du GP (entre 3:07 et 7:24), la voiture de sécurité est visible à partir de 6:32 :

Les équipes, les médias, la direction de course, le panneautage officiel ne sont pas d’accord entre eux et, pire encore, ne sont pas d’accord avec eux-mêmes d’un tour sur l’autre. Si Ganley n’est pas le leader du classement, il est en tout cas le leader de la meute : « Comme ils pensaient que j’étais devant, j’ai décidé qu’il était peut-être mieux d’essayer d’y rester, » déclarera-t-il dans la soirée. Le pace car s’écarte, le drapeau vert est brandi et avec sa modeste voiture, il parviendra à rester quelques tours devant le duo Stewart-Fittipaldi : « Je n’ai jamais piloté de cette manière dans toute ma vie. J’ai commencé à haleter si fortement que j’ai eu des problèmes pour respirer ! » Fittipaldi finira par le passer, puis s’échappera irrémédiablement grâce à un pilotage agressif et impressionnant.

Dans le paddock, il commence à se dire que le leader est Jackie Oliver. L’arrêt aux stands de la Shadow semble en effet avoir été bien plus rapide que celui de la Lotus. Si cette théorie est vraie, le fait que Fittipaldi soit devant Oliver dans la file du pace car signifie que le Brésilien compte en réalité près d’un tour de retard sur le Britannique. Il a 40 tours pour combler l’écart. Ce duel à distance finit par accaparer l’attention de tout le monde. Fittipaldi revient mais aussi brillant soit son pilotage, il ne gagne pas énormément de terrain. Oliver perd plus de temps au moment de dépasser certains « retardataires ». Les guillemets sont importants ici car parmi ceux-ci figure Jean-Pierre Beltoise. Le Français ne se laisse pas dépasser facilement. Et pour cause : il se pensait dans le même tour que celui que tout le monde prenait pour le leader. Il s’avérera que Beltoise était, à ce moment-là, effectivement en tête de la course, sans le savoir.

Par la suite, Jackie Oliver subit un problème d’accélérateur et perd du terrain. Il passe d’ailleurs par la voie des stands pour essayer de libérer sa pédale. Un groupe de voitures le dépasse à ce moment-là, sans qu’il y prête attention. Fittipaldi est toujours derrière lui mais toutes ces péripéties l’ont grandement rapproché de sa proie. « Une fois qu’il m’a eu dans sa ligne de mire, c’était fini, rien n’aurait pu le retenir, » dira plus tard Oliver. En effet : la Shadow n’était pas restée aux stands très longtemps et ses ailerons étaient toujours réglés pour des conditions humides, avec beaucoup d’appui. La Lotus, en revanche, avait été réglée dans les stands et volait dans les lignes droites. Cependant, même si le Champion du Monde 1972 prend l’avantage, le Britannique ne s’avoue pas vaincu et les deux hommes entrent dans ce qui semble être le dernier tour roues dans roues.

Colin Chapman passe alors le muret des stands, dans l’attente de son poulain. Quand la Lotus passe sur la ligne d’arrivée, moins de 2 secondes devant la Shadow, il lance – comme de coutume à chaque victoire de son équipe – son béret en l’air pour saluer « Emmo ». Les mécaniciens du stand McLaren voisin congratulent l’équipe aux voitures noires et or. Sauf qu’il y a un petit hic : l’homme au drapeau à damier, lui, est resté de marbre, regardant le couvre-chef sur l’asphalte se faire rouler dessus. Que se passe-t-il ? A-t-on crié trop tôt victoire chez Lotus ? Une attente fébrile d’une quarantaine de secondes débute. C’est alors que déboulent cinq monoplaces : tout d’abord, la Tyrrell de Stewart et, deux secondes derrière, l’ISO-Marlboro de Ganley qui aura maintenu la Tyrrell dans sa ligne de mire pendant 40 boucles et derrière lui la Surtees d’Hailwood, la McLaren de Revson et la March de Hunt. Et cette fois, le drapeau est agité pour… Peter Revson ! Quelques instants plus tard, Fittipaldi suivi par Oliver et Beltoise franchissent la ligne une nouvelle fois, le drapeau à damier s’agitant cette fois à leur passage.

Le paddock est estomaqué. Comment Revson, qui se traînait sous la pluie en 14ème position, peut remporter ce Grand Prix du Canada ?

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L’après-course

« Qui a gagné ? »

Les pilotes se rangent tous dans la ligne des stands. Emerson Fittipaldi est invité à se rendre dans le carré du vainqueur. Peter Revson aussi. En retirant leur casque, les deux hommes se sourient, personne ne sait vraiment. À course confuse, podium confus. Contre toute attente, la cérémonie de remise des coupes est organisée très rapidement après la fin du Grand Prix, alors même que l’on commence tout juste, du côté des officiels, à rassembler les informations concernant la hiérarchie. Et, malgré la poignée de supporters brésiliens très bruyants, c’est bien à Revson que le trophée de la victoire est remis.

Durant plusieurs heures, les commissaires traitent et retraitent les informations, les relevés tour par tour. Pendant que les équipes commencent à préparer les affaires en vue du départ, rien d’autre n’accapare l’attention : « Qui a gagné ? » Du côté de Lotus, le résultat provisoire passe mal : « Nous attendons de savoir et nous pourrons poser une réclamation, » explique Chapman. Pour Revson, en revanche, la confiance règne : « Je sais qui a gagné. Vous pouvez me féliciter dès maintenant. » Son équipe, en revanche, est plus prudente et avoue humblement ne pas savoir. L’écurie Shadow d’Oliver envisage de porter réclamation mais, en faisant à nouveau ses comptes, s’aperçoit qu’elle a oublié de décompter un tour à Revson. En toute fin d’après-midi, l’organisation aboutit à une conclusion : Peter Revson a bien remporté ce Grand Prix.

Du côté d’Emerson Fittipaldi, l’incompréhension est totale : il affirme que Revson a passé toute la course derrière lui. Ce n’est pas totalement faux : sous la pluie, l’Américain était loin derrière et au moment de la voiture de sécurité, il était en queue de peloton quand le pilote Lotus était parmi les premiers. Le problème, c’est qu’en attendant Ganley et en laissant passer beaucoup de monoplaces, le pace car a donné à certains pilotes une avance considérable.

« Quand la piste a commencé à sécher, notre équipe a vraiment été la clé. Avec leur expérience d’Indianapolis, ils ont pris la bonne décision en me faisant rentrer aux stands le plus tôt possible et en me faisant ressortir en piste, » indique Revson. En effet, la clé de cette victoire n’est pas seulement dans la confusion avec le pace car – qui y aura tout de même grandement contribué – mais aussi dans le fait que Revson et McLaren ont décidé de s’arrêter parmi les premiers et ne se sont pas embarrassés des modifications sur la voiture au moment de leur changement de pneus, contrairement à Stewart ou Fittipaldi. Ce choix leur a permis de gagner un précieux temps qui s’est transformé en avantage immense par la suite.

Revson, à l’aise dans le chaos

Assez étonnamment, Peter Revson aura remporté ses deux seules victoires en F1 en cette saison 1973, neuf ans après ses débuts dans la discipline en 1964, et aura soulevé le trophée lors de deux courses chaotiques. Ainsi, il ajouta le « triomphe » canadien à son précédent succès lors du Grand Prix de Grande-Bretagne où le carambolage du second tour élimina 10 monoplaces (qui ne purent prendre le second départ) sur les 28 (!) qui étaient sur la grille ce jour-là. Le pilote américain fut lui-même impliqué dans l’accident – y perdant son aileron arrière dans un contact avec la voiture, en travers au milieu de la piste, de son équipier Jody Scheckter – mais, disposant d’un mulet (une voiture de rechange), il put repartir. De leur côté, Graham Hill, Niki Lauda et James Hunt – dont le patron emprunta une boite à air à Mike Beuttler (la March blanche d’Hesketh était alors surmontée d’une boite à air jaune) furent les seuls pilotes à pouvoir réparer leur voiture à temps pour le deuxième envol.

Ce 14 juillet, cependant, la victoire de Revson ne souffre d’aucune contestation : après un mauvais départ, il imprimera un rythme soutenu et, profitant de l’abandon de la Lotus de Fittipaldi, fondra sur le leader, Ronnie Peterson avant de s’envoler vers le succès. Voici un résumé en longueur et avec des images de qualité pour cette époque du GP de Grande-Bretagne 1973, disputé à Silverstone :

En 1974, le pilote américain choisira de quitter McLaren pour la structure naissante Shadow. Malheureusement, il trouvera la mort lors d’essais privés à Kyalami.

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L’après-Grand Prix

La fin de saison 1973

La saison 1973, après l’épisode comique du Canada, s’achèvera dans la tragédie. Lors du dernier Grand Prix de la saison, à Watkins Glen, François Cevert se tuera lors des qualifications. Ce qui devait être la dernière course du grand Jackie Stewart est marquée du sceau du deuil et l’Écossais ne prend même pas la peine de courir son 100ème GP, trop affecté par la mort de son élève qui était devenu son ami. Ironie du sort, Jody Scheckter, avec qui le Français s’est accroché à Mosport et envers qui il faisait montre – comme une grande partie du peloton – d’une animosité importante, avait conclu un contrat avec Tyrrell pour 1974.

En signe de deuil, aucune Tyrrell ne prendra part à la course, laissant le champ libre, au championnat constructeurs, à l’écurie Lotus qui ne comptait alors qu’une unité d’avance et qui remportera la course grâce à Ronnie Peterson. La joie n’est évidemment pas au rendez-vous. Une semaine plus tard, lors du gala de la FIA qui récompense le Champion du Monde, Stewart annonce sa retraite sportive, une décision prise en avril que les événements de la saison 1973 n’ont fait que conforter. Le journaliste français Johnny Rives écrira alors : « En huit jours, la Formule 1 avait perdu son prince et son champion. »

Abandon de la voiture de sécurité

L’utilisation de la voiture de sécurité durant le GP du Canada 1973 a été un fiasco retentissant et personne ne peut nier que le vainqueur du Grand Prix du Canada a été façonné par le positionnement aléatoire du pace car devant la meute. Cela sonne le glas de cette méthode de neutralisation de la course. La Formule 1 regarde cette méthode comme un élément de la culture – voire du folklore – américaine difficilement adaptable à ce sport d’Européens, préférant ne pas y recourir. Ainsi, sans entre-deux, la direction de course n’aura longtemps que le choix entre les drapeaux jaunes et leurs risques et l’interruption pure et simple de la course et ses lourdeurs. Entre 1974 et 1992, 36 épreuves seront interrompues alors qu’entre 1950 et 1973, trois GP seulement l’avaient été, dont celui de Grande-Bretagne 1973.

Si des voitures de sécurité seront plus ou moins officiellement présentes lors de quelques événements – et notamment les Grands Prix de Monaco avec les fameuses Lamborghini Countach – il faudra attendre 20 ans pour que la FIA intègre officiellement la « safety car » (pour ne pas reprendre la terminologie « pace car ») au règlement, à l’aube de la saison 1993. Dès la seconde course de l’année au Brésil, une voiture de sécurité intervient à la suite d’un violent orage. La procédure est désormais codifiée précisément, accompagnée par les progrès en matière d’informatique et de chronométrage et des essais de ces véhicules ont lieu chaque jeudi avant les GP.

Depuis lors, la safety car s’est popularisée et son utilisation a crû, ne se limitant plus seulement aux gros incidents. Entre l’Australie 2009 et Singapour 2015, 125 Grands Prix ont été disputés et la SC – ou sa nouvelle dérivée, la voiture de sécurité virtuelle – est apparue plus de 80 fois en piste à l’occasion de 61 courses. Il n’est plus rare, aussi, depuis une quinzaine d’années, de voir des départs donnés sous le régime de la voiture de sécurité quand il est jugé que la piste est trop humide pour permettre un départ lancé sûr (comme ce fut le cas au Japon, en 2014, pour les deux départs).[tab:END]

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